lundi 27 février 2012

Lettre à ma tante sur l'Extrême-Droite et sur mon engagement à Gauche (suite)

... suite de la première partie de la lettre

... Mais parlons de nous, à présent. D'un côté, je comprends très bien les gens que la droite a déçus. Les classes moyennes propriétaires que, ni l'UDF ni le RPR ni l'UMP n'ont jamais aidés. 

 Mais je ne comprends pas votre position autrement que par une sorte de "croyance" :

Je sais que vous avez été tous deux fonctionnaires hospitaliers, de  bons techniciens, qui avez commencé avec un C.A.P et qui aujourd'hui possédez une jolie maison de campagne (mes cousins, vos deux fils en ont chancun une) deux voitures et vous avez une petite bicoque secondaire à la mer. Super. Vous avez eu la chance d'arriver à une époque où tout cela était possible, vous faites partie de la génération dite dorée, née après 1945, qui a connu et la prospérité, et la croissance, et l'emploi et la sécurité d'emploi. Aujourd'hui, à notre âge que feriez-vous ? Vous l'avez remarqué comme moi,  les plus nantis sont les plus égoïstes. Et cela vaut du haut de l'échelle jusqu'en bas.

Avec l'Extrême-Droite des Le Pen (qui passent leur temps à Strasbourg à voter avec la droite classique que vous récusez) la Fonction Publique offrirait-elle encore une garantie d'emploi à vie ? Sarkozy tente déjà d'abroger ce principe. Où en seriez-vous vous-même si l'un des Le Pen ou des Poujade avait dirigé la France avec ce projet politique dans les années 60 ? Vous, ou votre génération, qui avez tout connu, de la naissance à la retraite, ne pourriez-vous pas vous montrer en faveur de plus de partage ? 

De ce partage qui existait autrefois lorsque vous avez commencé à travailler, -puisque la part des salaires dans la richesse nationale était de 10 points supérieure à ce qu'elle est aujourd'hui. Ne souhaiteriez-vous donc pas plus d'égalité de chances à vos petits-enfants qu'à vous-mêmes, et non moins de d'égalité de chances ? Etes-vous pour un monde plus dur, moins sécure, au plan alimentaire, sanitaire, énergétique, salarial, culturel également ? La France et d'autres pays aussi développés que le nôtre sont, sur ces points, dans un sale état.


À bien des égards, si cela peut vous rassurer je trouve  le projet présenté par le Front de Gauche plus "nationaliste" -au sens de l'intérêt de la France, mais pas seulement la France- que celui du Front dit "National". Je m'explique. Je pourrais dire plus patriote.

Je joue un peu sur les mots, mais quand notre programme expose des réformes bancaires, la solution de nationaliser les banques pour avoir une vraie souveraineté nationale sur l'économie du pays, et sur la dette publique par exemple mais aussi et surtout sur tous les investissements à réaliser, c'est une  solution que bien des économistes savent bonne et viable mais que leurs aiguillons idéologiques leur intime de taire. 

Et justement, comme pour les trains, c'est une question d'aiguillage : nationaliser, c’est rendre à la Nation ce qui lui appartient, première étape pour ensuite créer un système socialisé du crédit où des intérêts  proches de zéro profiteraient à tous, entrepreneurs compris ! C’est pas idiot par les temps qui courent, et beaucoup de petites entreprises ou de locataires comme moi aimeraient y avoir accès... pas vous ?
 
Une nouvelle voie est en train d'apparaître avec le Parti de Gauche et ses alliés du Front de Gauche : un socialisme écologique et républicain qui a pour projet simple -mais salutaire- de libérer les entreprises, les salaires, l'agriculture, en protégeant toute l'économie de nos pays du capitalisme financier qui les rend malades.

Et je vous passe, chère tante, cher tonton, les détails du dispositif de sortie de crise élaboré par Jacques Généreux, docteur en économie,  qui édicte 10 points par lesquels il faut passer pour gouverner malgré les banques et les marchés financiers (tu peux trouver son bouquin très accessible “Nous, on peut” sur internet)

Les marchés financiers c'est quoi ? Ce sont les outils avec lesquels nos dirigeants ont lié nos démocraties, et qu'utilisent les profiteurs du travail : Quand l'Euro prend 10 centimes à cause de la spéculation sur les monnaies, Airbus perd 10 millions d'euros dans le seconde suivante, et ses salariés sont menacés de perdre leur emploi. On a du mal à le croire, mais c'est pourtant le monde que nous connaissons aujourd'hui. Lorsque quelques puissants dictent leur taux d'intérêts, un pays entier est réduit à la misère : la Grèce nous offre ce triste spectacle, à tous.

Et vous et moi avons marre d'entendre qu'on ne peut rien faire. Rien n'est plus faux.

Alors, les vrais fascistes, tiens, les voilà les vrais ennemis de la Nation, qu’on a laissés prospérer à outrance, pas voilés du tout ceux-là, qui s'étalent même en double page papier glacé, les multinationales, et leurs dirigeants cooptés plus que compétents.  

Ce sont eux qui font partir l’outil de travail à l’étranger, pendant qu’on nous montre que c’est l’étranger qui vient ici. Comme ça, l'électeur se trompe d’ennemi, on en abattrait notre frère noir alors que le dirigeant français de Total fabrique du chômage ici en allant se cacher là-bas, au su et au vu de tous ! 





L'intuition nationale comme espace juridique connu et plus sécurisant pour l'administration d'un pays était bonne en 1986, au moment de signer l'acte unique européen, elle l'était encore en 1992 et en 2005. Et justement ! C'est sur ce terrain-là que la gauche a avancé, pour preuve : le Front de Gauche est la plus grande coalition créée depuis plus de 40 ans. Il confirme le bien-fondé de la nation comme cadre et l'internationalisme comme objectif à terme , vecteur d'un progrès partagé ; mais pas l'internationalisme ultra-libéral des flux financiers qui est un visage odieux et régressif, un faux internationalisme sauvage.  Non, un vrai truc quoi, une mise en harmonie des Droits du travail en Europe, déjà...


Pour te rassurer, "Inter-national" ne s'oppose pas forcément à "national", car pour que des nations dialoguent, il faut qu'elles soient en état de le faire, qu'elles existent. Et le dialogue évite le recours à la force. Or, nous sommes réduits en ce moment à défendre un bout de gras, qu'on appelle le AAA, une note internationale et bien plus, anti-nationale. Pourquoi aurions-nous si peu foi en nous-mêmes, nous les français ? Nous n'allons pas nous diluer ! Nous le sommes déjà, à cause des droites européennes ! Nous ne pourrions que nous renforcer si nous avions tous en Europe, et la France en premier, des systèmes plus favorables à la sécurité de l'emploi. Au diable les pessimistes !

Cela va mal, c'est vrai, et ce serait la faute à un Mitterrand qui n'a même pas pu aboutir son projet de nationalisation bancaire (Europe oblige !). Et ce serait la faute aux étrangers ? Les voilà affublés d'un pouvoir extraordinaire ! Les problèmes entre communautés, je les connais, j'ai habité à Amiens, au Pigeonnier. Vous, peut-être est-ce dommage, n'avez pas connu l'ambiance d'une banlieue... 
Ce qui me rend triste, c’est que beaucoup de gens de ma condition traduisent leur colère par des simplismes politiques ; ils croient possible ce que raconte Le Pen depuis 30 ans parce qu'ils ont le sentiment d'avoir perdu avec la souveraineté monétaire et politique une partie d'eux-mêmes. On ne peut pas leur donner tort. 

Mais est-ce une raison pour avoir foi en un mouvement politique, le Front National, qui fait son marketing sur les peurs depuis 1965 et qui énonce des chiffres qui sont faux ou de vérités partielles ? (lire ça dans "Les 5 mensonges du Front national" de Laurent Mafféis, éditions Leprince).

Je crois que c’est précisément la présence de la droite extrême qui renforce la droite dite libérale et la modèle en droite sécuritaire, celle des puissances matérielles qui nous exposent à l'insécurité de l'Europe-sans-frontières, celle qui nous vend l’Europe à tout prix comme gage de paix, avec les résultats d'une dictature. L'expérience est là. Ce n'est en rien une Europe guidée par un socialisme...

Cette droite extrême incarné par Mme Le Pen, Claude Géant ou  Sarkozy, a l'habilité de détourner ces millions de gens, de vrais gens, qui autrement en découdraient, dans les urnes comme dans la rue, là, tout de suite, et pas en 2029 ! Mais je le vois depuis des dizaines d’années, grâce à l’instrumentalisation de la famille Le Pen par l’UMP, et le P.S depuis 1986*, toute occasion de changer de voie est ruinée. Alors qu'il existe des façons de gérer l'économie plus douce pour nous et pour la nature qui nous fait vivre. Mme Le Pen aujourd'hui et son père hier, empêchent, à la fin, ce pays de se réformer en profondeur.
Je ne veux pas paraître arrogant. Je vous dis sincèrement les raisons de mon engagement dans cette nouvelle gauche du XXI° siècle. Tout le monde peut se tromper. Tout le monde peut évoluer aussi. Encore vous, je peux comprendre, à côté de moi, vous êtes des gens aisés : voitures, plusieurs maisons, des parents et des enfants propriétaires. Vous pouvez être fiers. Moi je suis locataire, vous avez un patrimoine à transmettre et moi, rien. Vous avez peur de perdre, et moi de ne jamais avoir. C’est peut-être  toute la différence. 

Je pense comme ma condition me le permet et avec les outils que l'école publique m'a donnés. Je ne suis qu'un salaud de pauvre… L’Etat aurait dû être présent lors de ma sortie des écoles et il ne l'était pas. Ma seule force n’a pas suffi : le logement, toujours le logement, cette difficulté a ruiné mon entrée dans la carrière et donc dans la vie car, à la différence de nombreuses autres personnes prises dans la guerre économique, je ne me suis jamais prostitué, ni pour avoir un rôle, ni pour avoir un logement : Priorité n° 1 ! Mme Le Pen propose de les détruire les logements publics. Nous proposons d'en contruire. Le Privé ne veut, ni ne peut, le faire. Trop cher et ça ferait baisser le prix de tous les loyers. Alors c'est à nous de le faire, car la Nation c'est nous.



Et donc, j'ai trouvé mon camp. C’est même parce que le programme de du Front de Gauche est tellement pertinent et qu’il a fait ses preuves ailleurs parfois, comme en Argentine au grand dam des grosses fortunes et des banques privés, que je pense que le candidat qui le mettrait en œuvre pourrait y laisser sa peau au bout de dix jours s’il arrivait au pouvoir, et même pas par des militants d’extrême-droite, pas du tout. Par des puissants qui, parce qu’ils ont grandi et vécu comme des paranoïaques, n’auront pas compris l’intérêt général qui est visé par son programme, mais n’auront vu qu’une menace : celle contre leurs intérêts matériels particuliers, et même pas ceux de leurs enfants. C’est triste.
Je n'en veux à personne, je n'insulte personne et surtout pas les miens. J'essaie simplement de faire partager les éléments de mon évolution car moi aussi, à ces fariboles, j’y ai cru, un temps. Mais j’avais quinze ans, une faible expérience de la vie et des autres. J’étais ébloui par ce que disait Le Pen. Et quand on est ébloui, on n’y voit plus rien. 

Aujourd'hui, avec les fondateurs et fondatrices du Parti de Gauche, Raquel Garrido, Martine Billard, Danielle Simmonnet, Laurence Sauvage, Jacques Généreux, Henri Pena-Ruiz, François Longérinas, Marc Dolez, François Delapierre,  Alexis Corbière ; Mélenchon, puisque c'est lui dont on a parlé, homme de qualité qui aura bien ses défauts, avec derrière lui nous autres, les centaines d'experts du terrain qui le rejoignent, je possède quelques clefs de compréhension du monde et des rapports de force qui sont à l'œuvre. Chevènement avait commencé le travail. Tous les autres me l'avait masqué. Pour cela -rien que cela !- je lui dis, Merci Jean-Luc. 

Chère Tatie, cher Jean, qui avez entendu des sirènes, entendez cette vraie parole et faites-en ce que vous voulez : Re-Prenons le pouvoir !

Je vous embrasse.
Votre neveu.







*François Mitterrand avait alors organisé le scrutin à la proportionnelle à l'Assemblée nationale, faisant entrer des députés du F.N  pour diviser la droite. Stratégie qui s'avéra perdante.





http://page.to/sacremeluche370foislesmic

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