mercredi 20 juin 2012

Ce qui fait notre force

Au lendemain d'une séquence de campagne comme la gauche du P.S n'en avait jamais connue, le Parti de Gauche devrait bientôt lors de son Conseil National ce samedi 23 juin 2102 s'interroger sur sa manière de communiquer ses propositions, son efficacité, et à quel rythme les faire avancer.




Je souhaiterais que ce jeune parti, qui fut bousculé par le calendrier électoral, ne coure pas derrière le FN. C'est toute la droite qui reste à combattre. 


Il devrait se re-concentrer à tout prix sur ce qui a fait sa force : les thèmes socialistes alter-mondialistes ont amené une forte audience et une vraie crédibilité au Parti de Gauche. En particulier les propositions écologiques et économiques, articulées à leur contre-exemple frappant et malheureusement prégnant : le néo-libéralisme financier et ses effets sur nos vies et l’environnement.

Nicolas Hulot révèle un peu tard que son bulletin est allé à Jean-Luc Mélenchon. Cela ne montre-t-il pas que l'écologie, lorsqu'elle est rationalisée et adossée à une critique sociale, porte bien au-delà des sensibilités partisanes ? Ne voit-on pas que l'avenir d'une Gauche qualifiée de raisonnable et non plus farfelue se dessine à partir de ces questions ?

Nombre d’électeurs ont pris la mesure de la richesse intellectuelle qui se dégage du Parti de Gauche, lequel pour ma part m’a fait énormément avancer sur des sujets comme l’écologie politique, l’économie, le travail, etc. Mais je n’ai pas adhéré à un groupe spécialisé dans la chasse au FN. Ce serait bien réducteur et bien injuste pour toutes les commissions agriculture, économie, logement, lgbt, culture, etc. qui travaillent par ailleurs en ne situant pas leurs travaux par rapport à ce que dit, pense, ou ne pense pas le FN.
 
Pour faire la part des choses correctement, il est vrai aussi qu’il fallait que ce travail de démystification des positions du FN fût fait, et il a été remarquablement mené par nos camarades Laurent Mafféïs, Christiane Chombeau et Alexis Corbière et par nous tous sur le terrain. Il n’avait été mené par personne depuis 30 ans que le FN sévit... bravo. Quelle fierté ! Nous pouvons toujours nous reporter à leurs travaux et les féliciter pour tant de travail.

Mais je regrette seulement que ce beau travail de démystification politique puisse être retourné contre nous pour nous enfermer dans un piège réducteur “Front contre Front” où les medias voudraient nous réduire. 

 


Le combat contre le FN vient après une séquence très prospère, où le PG et ses partenaires ont pu aiguilloner la presse, l’alimenter de notions intéressantes en matière de propositions de gouvernance économique fédérales, de critique du financiarisme ; nous avons pu nous appuyer sur les effets de la crise bancaire de 2008, du printemps arabe et le mouvement des Indignés. Le PG a su enclencher une dynamique de terrain dès les élections régionales, non sur la critique frontale du F.N, mais sur ses positions propres

Puis, les meetings de pédagogie populaire restent ce que j’ai vu de plus enthousiasmant à ce jour. Voilà la formule qui marche.
 
Sur ce sujet, je voudrais relayer le sentiment de Gérard Filoche. Pour lui, combattre prétendument Front contre Front est un “duel nourrissant” pour le FN. Méditons cette position. Le FN concentre-t-il ses efforts à disqualifier le Front de Gauche ? Non. Il nous ignore superbement. À force de parler de l’ennemi on a le tort de le faire exister, et je ne voudrais pas que ça prenne l’énergie du Front de Gauche au détriment d’une position vent debout contre le cheval de troie du néo-libéralisme : la droite. 
Le FN n’est pas un épiphénomène de la droite car il exerce bien une influence sur elle. C'est une apparence particulière de la droite et même un effet secondaire pathogène de ses politiques socialement destructrices. 

Sur le mécanisme (et même si l’on peut comme le fait remarquer mon blog ami Le cri du Peuple s’en remettre à la longue expérience des dirigeants du FdG) je pense qu’il serait une erreur de croire qu'une aile politique puisse donner des leçons à une autre (supposée se coucher) en la combattant “mieux", dans un duel devenu binaire. Se concentrer sur ce combat est utile électoralement, mais le problème est que la spectacularisation de la politique dont les medias font leur miel, n’attend que ça et seulement ça, manière commode pour les medias mainstream d’occulter nos propositions positives. Le voilà le piège !
 
Souvenons-nous de ce que Ras-le-Front a apporté à la LCR... Il faudrait surtout ne pas répeter la même erreur.



La question du FN est bien une question tactique, sensible certes, très importante bien sûr, mais de pure circonstance. Il y a eu autour de la question du FN une indéniable avancée tactique. La question stratégique de fond demeure le traitement du capitalisme et de son avatar moderne appelé néo-libéralisme.
  • Les mots justes

Avançons donc avec nos propositions, positivement, nos idées sont très fortes et très courageuses. Mais elles sont aussi très exigeantes. N’oublions pas que nos avancées les plus marquantes l’ont été grâce à la répétition de critiques des mécanismes institutionnels et financiers. Ces éléments accompagnent de façon synchrone et cohérente une prise de conscience mondiale de ces questions.
 
Nous devons donc urgemment de nous réaccorder sur ces concepts de libéralisme, de libéralité et de liberté et nous accorder sur leur sens. 

Si notre tradition est philosophiquement libérale car héritée des Lumières, il devient urgent et ne plus manier ce concept de “libéralisme” n’importe comment. Car qui était “anti-libéral” dans l’histoire ? Staline, Hitler, qu’on nous jette à la face, car l’imprécision des mots prête le flanc à la critique la plus facile. Prenons garde à définir clairement nos élements de langage, et ne ré-employons pas des mots qui ont été popularisés de manière simpliste par le Parti communiste français.
 
Nous ne devrions plus pouvoir écrire dans nos publications des antinomies comme un jour ce titre : “les diktats libéraux de Bruxelles”… Ça, c’est les bâtons pour se faire battre et ne pas voir qu’à la fin nous parlons un sabir d'initiés, et que nous affaiblissons par-là la pertinence de notre critique économique. Nous ramons contre les vents dominants -qui sont à notre époque rugissants. Nos propositions demandent un effort d’adaptation intellectuelle à l’auditeur comme à l’orateur, car nous secouons le cocotier des représentations mentales ressassées depuis trente ans.

Ce que j’ai ressenti dans cette campagne, c’est que nous avons besoin de plus de temps pour expliciter nos idées car elles modifient les représentations, face à des idées simplistes qui, allant dans le sens du vent, mettent une seule seconde à entrer dans les esprits. 


Nous avons la chance d’avoir à l’antenne un orateur doué d’une vision exceptionnellement claire et avantagé par une longue pratique médiatique. Donc, gardons notre avantage, et ne perdons pas ce temps précieux en questions fermées et en idées mal exprimées sur le terrain, dans nos blogs et nos revues ; à ce titre les “Vendredis du PG” doivent être développées partout où des expertises de tous ordres sont disponibles auprès des comités. Nous initions avec des camarades des comités de lecture de proximité, susceptibles d’apporter un suplément de formation.
 
Je me permets de vous dire cela car nous sommes nombreux, de retour de campagne, à avoir croisé de braves gens ayant eu pour toute nourriture ces amalgames, ces idées toutes faites dont la droite fait un chemin vers les urnes. La réalité contemporaine est d’un côté déformée (nous serions un pays où les "charges" sont les plus fortes d’Europe) et de l’autre nos apports sont ignorés quand ils ne sont pas caricaturés (une fiscalité à 100% à la marge supérieure de l’impôt sur le revenu serait une violation de la propriété privée). Que n’avons-nous pas entendu par exemple, attelés au Parti Communiste, que nous serions "une officine favorable au Gosplan, à la collectivisation des moyens de production", etc. Et je ne reviens pas sur les ignominies dont notre mouvement a été l’objet au cours des sinistres quinze derniers jours de campagne présidentielle, nous en avons assez entendu. 




Mais justement, ne laissons pas les simplifications, les réductions et les mensonges salir notre beau combat contre ce monstre totalitaire : le néo-libéralisme financier qui, lui, n’a rien de libéral. Je renvoie chacune et chacun à la lecture des ouvrages de notre camarade Jacques Généreux sur cette question du libéralisme. Comme il le dit si bien, abordons les choses dans leur complexité. C’est déjà tellement révolutionnaire.