Même Martine, ma voisine de rez-de-chaussée dont le petit cœur balance entre un Copé fort en gueule et un Fillon en marbre dur, le reconnaît : "T'as vu chez Ruquier ? encore une émission de télévision où Jean-Luc Mélenchon fait un carton !". Puis mon amie Ariane Walter en a immédiatement conçu un énième article sur Agoravox, un de trop peut-être, sur le sujet de son admiration pour cet homme-là.
Or, je pense que cette focalisation sur la personne de Mélenchon est comme l'image inversée des attaques ad hominem. Aussi irrecevables :
Il serait temps de passer à d'autres considérations. C'est vrai,
jusqu'où va-t-il hisser le niveau des prestations télévisées que les
spectateurs attendent d'un homme politique ? Mais attention, à force de trouver à
Jean- Luc Mélenchon des qualités d'orateur, on ne cesse de prêter
attention à la forme, qui est brillante certes, et on en oublie un peu
le fond. Tout orateur, pour brillant qu'il soit, ne fait pas le
visionnaire. Là, on a la chance d'avoir les deux pour le prix d'un.
La question du talent oratoire reste secondaire alors que la placer devant la rendrait dangereuse. Elle donne du crédit au pouvoir sur-dimensionné des mass-média au détriment de la critique ou de l'objectivité du citoyen. Car enfin Jean-Marie Le Pen en était un autre, qui maniait la langue française, à la rouerie et à la répartie légendaire, qui en a scotché plus d'un sur son siège de journaliste à la solde de l'intelligentsia social-démocrate ou démocrate-chrétienne suivant que l'interviewer était Libération ou La Croix.
On oublierait alors un peu vite le fond
de la pensée politique de Mélenchon et du combat que lui et ses
centaines de camarades proches mènent actuellement, quelquefois au
détriment de leur santé ou de leur vie de famille, pour innover en
politique, pour faire avancer l'idée d'un socialisme alternatif ou
Eco-Socialisme, bref, pour que ne cesse pas le Progrès.
Effet
pervers supplémentaire des médias, on ne cesse d'enfermer Mélenchon
dans une solitude qui n'est pas la réalité de l'homme Jean-Luc. Qui
parle de son journal en ligne tenu et daté de toutes les séances du Parlement européen où il siège avec une application qui force le respect. Quel autre député en fait autant ?
Qui parle du "Contre-budget" rédigé voici quelques jours par le Parti de Gauche ? (Il est ici disponible)
Qui parle des femmes et des hommes qui œuvrent autour de lui, de Martine Billard, de Eric
Coquerel, de Delphine Bauvaois, de Gabriel Amard, de François Delapierre, de Henri Pena-Ruiz,
de Raquel Garrido, de Alexis Corbières, de Jacques Généreux, de
François Longérinas, de Nathanäel Uhl, de Guillaume Etiévant, de Mathias Tavel, de Laurent Mafféis, de Laurent Levard, de Jean-christophe Selin, de Corinne Morel-Darleux, de
Pascale Le Néouannic, de... il y en a cent comme lui, et autour de lui.
Ariane pourrait leur consacrer autant de brillants articles.
Et puis survient la fin de l'émission, et Ariane Walter a raison tout de même : l'inoxydable Carole Bouquet, à la sensualité tellement débordante qu'on ne rêve même pas de la croiser autour d'un buffet froid, le reconnaît : "trésor national" a-t-elle lancé au milieu d'un parterre conquis.
Je ne sais pas non plus si j'irai jusque là, car il y a dans cet excès de flatterie un zeste d'hypocrisie dont je sens bien cette femme là capable (la Carole, pas la Martine). Mais voilà : (je mesure mes paroles conscient que ça va faire grincer)
- C'est l'expression de "national" qui m'interpelle. Car en effet, selon moi, n'en déplaise à tous ceux qui s'effarouchent avec les mots et se couvrent de leurs lunettes rouges carmines, Mélenchon serait peut-être plus "nationaliste" que Marine Le Pen, au sens du bien-être économique et social "national". Absolument pas au sens du droit du sang bien entendu. Mais au sens hérité de la Commune où la Nation est un cadre juridique garantissant le contrat social. Il n' y aura pas photo à l'arrivée, si arrivée il y a. Quand plus de gens en seront persuadés, et cesseront de prendre la vessie de Marine Le Pen pour une lanterne, le programme politique du Front de Gauche, économiquement performant, écologiquement responsable et socialement juste obtiendrait facilement la majorité dans ce pays. Et c'est la même Carole Bouquet qui ajoute ce mot plus inspiré : -"Je préfère mon pays avec lui que sans lui". Moi aussi.
Oui, car la gauche socialiste est libérale philosophiquement (relire "Le Manuel critique du parfait européen"
de J. Généreux). Mélenchon l’étant, il n’a rien d’un extrêmiste de
gauche puisque son programme est socialiste (et pas communiste, désolé,
ce sera pour plus tard, peut-être...).
On peut être parfaitement libéral et haïr le néo-libéralisme financier.
Libéral et pour autant réorganiser les institutions juridiques, les
cadres constitutionnels, les régulations financières et les barrières
commerciales ! On peut très bien prôner et favoriser les échanges culturels internationaux et vivre dans un régime commercial moins ouvert,
pour ne pas dire fermé, que celui organisé de force par l'OMC et ses
thuriférarires de La Commission du dikat européen de Bruxelles ... (lecteurs de Fichte, bienvenue ici ...)
Qui nous a vendu depuis 1971 la libéralité des échanges culturels et linguistiques comme étant la
valise embarquée du néo-libéralisme et des libres échanges commerciaux ?
Les faucons américains, suivis par leurs toutous de la droite française
Giscardienne puis Balladurienne. Or, c’est un mensonge.
Il y a des alternatives, et c’est ce que Mélenchon commence à faire saisir à un auditoire désorienté.
Il faut le faire patiemment, car la re-création de représentations
adéquates prend du temps face au rouleau compresseur totalitaire d'une
information par trop univoque. Et c'est sur ce sujet (à la fin) que
Mélenchon a été brillant, face à un Aymeric Caron qui ne savait plus
quoi trouver pour que son patron Laurent Ruquier ne le trouve pas
totalement transparent.
C’est la droite financière qui ne l’est plus, libérale. Pour faire 50%
aujourd’hui enFrance après ce qui s’est passé en 2008, il faut donc qu’elle entretienne un rêve, voire
qu’elle mente et sur le diagnostic et sur ses intentions. Si j’étais de
droite et libéral, je serais furieux. Et je me dirais qu’il manque un
Mélenchon à droite.
Peut-être que cet homme là, cet homme et les équipes qui l’entourent
(et ils sont de plus en plus nombreux, experts, économistes, ingénieurs,
écologues) est un trésor national au sens où dans le
contexte hautement volatil et dangereux qui est le nôtre, il sera un
déclencheur, porteur d’une voie tracée par d’autres mais incarnée par
lui aujourd’hui.
Plus important que tout ce qui vient d'être écrit plus haut : au cours
de cette émission Laurent Ruquier a eu la courtoisie d'évoquer les 1ères Assises de l’Eco-socialisme qui auront lieu le samedi 1er Décembre à Paris XII°, aux pelouses de Reuilly.
- Avec : Hervé Kempf, Susan George, René Ramirez (ex-Ministre de la planification et du développement d’Equateur), Michael Lowy, Jeanette Habel, Aurélien Bernier, Martine Billard, Arno Munster, Jacques Généreux, Jean-Luc Mélenchon, François Ruffin, Corinne Morel-Darleux, Gabriel Amard, Myriam Martin...
> Lire le blog de Corinne Morel Darleux, auteur, et accessoirement bras-droit écologiste (avec d'autres) de M. Mélenchon. http://www.lespetitspoissontrouges.org/index.php?post/2012/11/13/La-raison-de-mon-silence
Michéa, la Servitude libérale
http://www.lepoint.fr/actualites-chroniques/2007-09-06/jean-claude-michea-et-la-servitude-liberale/989/0/199481
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