dimanche 23 mars 2014

Les Professionnels de la Culture : ni Chômeurs-ni Quémandeurs


Parus sur Agoravox, malvoyants :  


Depuis le début de la semaine, les négociations entre partenaires sociaux vont bon train sur le devenir de l'assurance-chômage des annexes Unedic visant les intérimaires, les professionnels de la Culture appelés avec condescendance "Intermittents" (du spectacle). En fait, ces négociations durent depuis quelques semaines, pardon quelques années. Et où tous ces pourparlers ont-ils lieu depuis quelques semaines quelques mois, quelques années ? Nulle part, mais ce qu'il faut voir c'est là où elle finissent : un restaurant parisien, un lieu neutre, un restaurant parisien, à l'invitation du Mouvement pour les Entreprises de France, plus connu sous le sobriquet conspué de Medef (Medeuf lui irait mieux).

Dès lors que les dits professionnels syndiqués ont commencé de s'apercevoir que les négociations se menaient dans leur dos, il sont eu pour idée très moderne de démocratie participative d'ouvrir un lieu parisien, central, ouvert, libre, de réflexions, d'ateliers qui soit caisse de résonance pour les syndicats. Une barque dans la nuit, pleine de bougies, perdue au milieu de l'océan Ayrault-Hollandais qui borde nos rives. C'était l'opéra.

Les citoyens soucieux de leur régime interprofessionnel de solidarité l'ont choisi pour y tenir des ateliers de concertation, de propositions, de façon à ce que les négociations ne se passent plus dans leur dos, voire sur un coin de table, (ou dessous, c'est comme on veut) entre 20 h et 00 h 00 entre le Medef et la CFDT.

course poursuite 

Puis vendredi 21 au matin, les ors du foyer de l'opéra Garnier ne cadrant pas avec la supposée marginalité crasseuse des Intermittents (alors que ce sont des professionnels de la Culture, notez bien) les naufragés ont souqué vers le Carreau du Temple où là, ils ont été pourchassés. Moi qui vous parle, j'ai alors vu 14 fourgons de Gendamerie et de Police arriver. Il s'agissait d'encercler le bâtiment flambant neuf et rénové du Carreau du Temple (3° arr.) et de mater la rébellion dans l'œuf. On a les larmes aux yeux de voir le service public fonctionner aussi bien...

- On... veut-bosser !
- Salauds !
- Dé...mocratie !
- Faignants !

Ainsi ceinturé, le bâtiment ne laissait plus librement ni le citoyen ni le professionnel (c'est le même) aller et venir se renseigner. Chaque manifestant qui en sortait ne rentrait plus. Et chaque occupant n'avait qu'à sortir de sa grotte s'il avait faim.

rumeurs, on-dit, anathèmes


Carreau du Temple, 22 h 30 samedi 22 mars 2014, Paris.

Dans la même soirée pendant que cette noble assemblée se tenait à carreau, vers 20 H 00, du côté du siège du Medef, un Délégué de la CGT-Spectacle me le rapporte, on vit un membre du MEDEF inviter à dîner pendant l'interruption de séance un camarade syndiqué (entendez par "camarade" un membre négociateur de la CFDT...). De retour vers 00 h 06, le camarade syndiqué signait sans barguigner l'inique protocole d'accord des nouveaux accords qui vont lier (c'est le mot) à ce régime d'assurance-chômage coûteux, dispendieux et compliqué, quelque 100 000 intermittents du spectacle pour dix ans encore. Magique !

Ces deux-là auront réussi, en 4 petites heures, à ce que des semaines, des mois et des années de propositions et de négociations n'avaient pas abouti. Extraordinaire. Voici les conséquences ordinaires de l'accord signé avec la CFDT samedi dans la nuit : http://www.orlaim.com/reglementation.

Puis vient cette annonce façon patronat :  plafonnement à 5400 €/mois ! La belle affaire ! Cette somme annoncée ne recouvre aucune réalité. Elle discrédite les intermittents dans leur ensemble, dans la droite ligne (la ligne de droite ?) de l'anathème de "privilégiés" dont on nous affuble depuis 20 ans.

le caddie humanitaire qui n'a pu rentrer
même avec Danielle Simmonet et Eric Coquerel, élus PG de Paris.
 
Dans la journée de samedi, nous qui étions à l'extérieur commencions à nous inquiéter pour la santé de nos camarades enfermés, et qui, poussés par la faim, auraient pu défoncer les portes pour sortir (!). Nous sommes donc arrivés avec deux élus, et une "valise diplomatique", un caddie de courses avec de l'eau, du fromage, du jambon, du sopalin, de miettes de thon par boîte de trente.

Le Printemps s'annonçait, le Soprano Caffè Pizze était plein, et Charlotte était belle. Sa danse a ému les agents de la Compagnie Républicaine de Sécurité... mais les aliments sont restés à la porte, avec les Elus.















Je vous laisse apprécier sur cette vidéo ci-dessous comment les forces de l'ordre ont maintenus enfermés (!) les occupants dans le Carreau du Temple, alors qu'il étaient censés les en faire sortir. 





Puis vers 22 h 30 un monsieur est exfiltré manu militari. Il nous livre ses premières explications ici.



malentendus


En tant que professionnel de l'audio-visuel, comédien, écrivain, homme de gauche, j'ai apporté tout mon soutien à la démarche syndicale ; mais j'ai commencé à ne plus comprendre ce qui se passait lorsque j'ai entendu clamer ce slogan : "Chômeurs-précaires-intermittents, AVEC OU SANS-papier... Solidarité !" ....

Le slogan pour sympathique qu'il soit et même juste, devient parfaitement décalé dans le ci-devant contexte des annexes IV, VIII et X de l'Unedic ; et même indigent.

Solidarité, certes lorsqu'il s'agit d'organiser le régime d'indemnisation qui va garantir la pérennité économique des entreprises qui les emploient, garantir de bonnes conditions de travail durant les productions, et d'aussi bonnes en dehors, hélas, des productions. Le Professionnel du spectacle doit s'adapter à l'hyper-flexibilité de son secteur. C'est un travailleur hyper-moderne ! On devrait le féliciter d'offrir par son consentement à un tel régime, le plus contrôlé de tout le salariat, à une telle vitrine-modèle du MEDEF....

Pourquoi diable amalgamer ces différentes catégories dans la même phrase ? Que vient faire ici le travailleur sans-papier ? Lorsque nous le défendons, crions-nous "intermittents" ?

Or, c'est exactement ce que veulent les oligarques du Medef : nous désigner comme des marginaux à fortes prétentions pour exercer une pression à la baisse, et faire régner le mépris d'une population laissée dans l'ignorance ; ça pue la morgue. Or, je pose une question : Quand allons commencer à comprendre ça avant de brailler n'importe quel slogan ?

Et puis une autre chose, mes amis les professionnels, précaires ou pas : bannissez ce mot de "chômeurs" de votre vocabulaire. Là encore, c'est prêter le flanc à une critique infondée : 


Que ce soit dans le spectacle ou dans le reste du corps social, il n' y a pas de demandeurs d'emploi.
Il n' y a que des professionnels disponibles qui offrent leur force de travail. 

Rallions-nous plutôt derrière la bannière : 

NI CHOMEURS-NI QUEMANDEURS

propositions

Le régime d'assurance dans sa forme actuelle, problématique depuis 2003, générateur d'exclusion de 30 000 professionnels de toute assurance-chômâge chaque année est reconduite pour 10 ans s'il n' y a pas de forte mobilisation. 

Je suis on ne peut plus sérieux : face à l'arrogance du Medef qui ne reconnaît aucune des propositions du Comité de suivi, ni des syndicats de salariés majoritaires (la CFDT ne représente que ____ %) donnons du fil à retordre au MEDEF :

Pourquoi ne pas proposer en effet qu'un seuil de 253 heures soit institué pour apporter tout de même une assurance-chômage de 6 mois à ces innombrables professionnels du spectacle qui ne parviennent pas à faire leurs fameuses 507 heures en 12 mois, faute de carnets de commandes remplis ? 

Pourquoi sinon ne pas proposer que les entreprises du CAC 40 sorte du champ des cotisations aux annexes VIII et X et que le MEDEF par voie de conséquence sorte du champ des discussions paritaires ?

Intermittents et professionnels de la culture, soyons solidaires mais aussi inventifs. Les 507 h. sur 12 mois, qui seraient à reconquérir, ne sont pas pour autant une panacée : 

Chaque année, 150 000 d'entre nous cotisent et ne reçoivent pas d'allocation. C'est ça qu'il faut regarder.

Que seuls 2,5 % de la richesse créée par les Industries Culturelles chaque année (soit 1 milliard 475 millions  sur les 59 Milliards dégagés) soit prélevé et nous garantirons les 100 000 professionnels du spectacle d'un revenu de 1300 €/mois QUOI QU'IL ARRIVE dans leur carrière. Et nous nous affranchirons de la tutelle bienveillante du Medef. 

D'aucuns s'offusqueront ; à cela je réponds par avance que cela relève du choix de société. Libres à eux de se déclarer impuissants dans une société dirigée par l'argent et le mégotage social, quand des milliards de dollars transitent chaque jour par des paradis fiscaux que nous tolérons et même défendons sur notre territoire (ex. Monaco...) Cela suffit.

La Belgique et d'autres pays le font, selon des modalités différentes, mais nous français ne savons pas le faire.... Automatique et sécurisant, cela occasionnerait de moindres coûts de fonctionnement et pas de fliquage administratif coûteux et inutile. Cette mutualisation n'empêcherait pas ceux qui gagnent plus de gagner plus encore, mais empêcherait bien que chaque année 30 000 collègues restent sur le bord du chemin. Donc, une fois encore, au travail !

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