Comme il est navrant cet exercice de communication, que dis-je, de cirque politique de bas étage qui consiste à rapprocher bien artificiellement un Président, préoccupé de dossiers, de protocoles, avec un panel de citoyens divers et pas si variés qui ne lui posent pas ou très peu de vraies questions. La France qui se lève tôt pour pointer à Pôle emploi, avec son médecin et son agriculteur, son ouvrier, il l'avait devant lui, attablée comme au bistrot.
Comme dans un bon thriller, ça a commencé très fort : Rendez-vous compte, on découpe une jeune fille en morceaux ... et le chapelet des faits divers. La petite boutique des horreurs affichait les soldes. Pour les inaugurer, un aveu "humain" (on y reviendra) du Président : Il est choqué. Nous aussi. On atteint des bas-fonds historiques.
Sauf que nous Français d'en bas, nous le regarderions comme un modèle peut-être s'il incarnait la fonction qui doit l'élever au-dessus des passions humaines particulières, car après tout, c'est le Premier Magistrat de France (n'est-ce pas ?) et nous savons qu'il a le Bouton-Rouge sous les doigts. Mais il ne s'habille chez le même tailleur qu'un De Gaulle ou un Mitterrand, peut-on le lui reprocher ? Oui.
Donc, on manie du registre émotionnel pour mieux marquer sa proximité. Attention, faudrait pas l'énerver. Le Président de la République promet que s'il y a faute il y aura sanction. Au même moment, avec ironie l'Histoire se passait ailleurs. Le honni Moubarak commençait son discours par un aveuglement qui a des allures de marque de fabrique chez les dictateurs : "Je punirai les responsables avec la plus grande sévérité"... Mais brisons-là ces velleités d'amalgame mal venues.
D'abord, je suis choqué, moi, par la remise en cause de la Justice des Mineurs. Que le sommet de l'Etat en vienne à défier ses juges* et mette en balance les adolescents des années 50 et ceux d'aujourd'hui, ça a quel sens ? Qui est responsable des jeunes, sinon la société des adultes ? C'est toujours pareil, on vient agiter, précariser, même insulter sur la dalle, aggraver les difficultés économiques, et après on envoie la police, et pour les enfants de surcroît. Nicolas Sarkozy : elle à vomir ta vision d'homme d'Etat. En as-tu seulement une ? En es tu seulement un ? Ce soir j'ai su que définitivement : Non.
Cette façon de faire accroire que les services de l'Etat -dont ta politique historiquement de droite affaiblit chaque jour les marges de manœuvre, c'est son but- pourraient rendre une copie parfaite est tellement facile et dangereuse. L'exigence ou le mythe de la perfection est une maladie mentale dont les fascismes se nourrissent, tapis au fond de ce piège classique.
C'est une posture non seulement socialement rétrograde, démagogique en puissance tu l'as prouvé tout au long de la soirée, mais pleinement régressive ; ça ! elle s'aligne bien sur la brève de comptoir du facho qui s'ignore. Choisis mieux tes amis, entre Brice et Christian de Nice... Car c'est sur le rapport à l'étranger que ta vision éclate au grand jour. On parle toujours des coupables, on ne s'intéresse pas aux victimes, était la chanson d 'hier. Celle d'aujourd'hui c'est : On se préoccupe plus de l'identité de ceux qui arrivent et pas assez de ceux qui accueillent. C'est d'ailleurs les mêmes, n'est-ce pas Mme Le Pen, les coupables, ceux qui arrivent, les victimes ceux qui accueillent. C'est simple et ça dédouane les choix politiques qui sont responsables de la faillite des gouvernements Européens. L'extrême-droite n'aurait pas dit mieux. Bravo. Tu ne fais pas de la politique de gouvernement, tu fais de la politicaillerie électorale. Silvio Berlusconi ton ami, est ton maître.
Peu de vraies questions au cours d'une soirée longuette, hélas, peut-être par intimidation, ou déférence face à quelqu'un qui parade en parlant des grands de ce monde qu'il a rencontrés la veille. J'en ai retenu une qui a été éludée de la manière la moins glorieuse qui soit. La qualité alimentaire, l'inflation des denrées alimentaires de base, l'avenir de nos campagnes. Elle émanait de ce paysan moderne du Pas-de-Calais qui fait du bio. Un type cultivé qui ne se paye pas de mots. Souviens-t'en. Il n'a pas été rassuré par ta réponse ou plutôt ta réduction des problèmes agro-alimentaires à la traçababilité ; comme n'a pas semblé rassurée la pharmacienne sur la question de la difficile insertion des jeunes au milieu des getthos de banlieue, ni l'étudiant sur la question de la privatisation de l'université, mais lui, son espoir est déjà ailleurs ; ni l'ouvrier de St Nazaire lorsque, quasi menaçant tu déclaras que nous devions continuer à "tailler des croupières à Boeing" jetant donc des employés américains au chômage, nous jetant, nous, un peu plus encore dans la guerre économique généralisée (un conseil, vends d'abord les Rafales de M. Dassault avant de nous les faire racheter et parler d'Airbus). Tout comme n'était pas franchement rassurée l'enseignante d'entendre qu'on enverrait les enfants difficiles en section spécialisées et laisser les profs travailler plus sereinement ; ni la cheffe d'entreprise Bretonne qui demande un regard moins hostile et surtout "moins de normes" ; ni la mère célibataire à qui tu annonces qu'il y aura 500 000 000 d'Euros alloués à la formation : pris sur les budgets des autres Ministères, quelle sortie !
Quel avenir alors ? Mais tu l'as dit : "Avec des crédits d'impôts vous allez pouvoir investir". Oui, nous allons pouvoir transformer notre Livret A en actions chez lexomil... secteur d'avenir avec des élus affairistes prêts à tout, surtout servir leurs propres intérêts privés ou familiaux au passage.
Les profits du CAC 40 détenus à 43% par seulement 98 personnes explosent, mais toi, tu nous a expliqué que ...si les charges (les cotisations sociales, en français correct) écrasent les entreprises, comment-voulez-vous que les salaires augmentent ?
De ton côté, le terrain est préparé pour 2012 car tu as trahi son thème de campagne qui masquera la réalité de ton obsession permanente : ne rien laisser à moudre au FN. Nous non plus. Avant d'arriver à 2012, il faudra passer 2011. Pour mieux nous faire avaler la réalité anxiogène des politiques que tu mènes de concert avec les droites européennes, tu sors cette pilule anxiolytique à maintes reprises : peut-être cinq ou dix fois as-tu martelé les mots Humain, Humanisme, Humanité.
Et ton humanisme, tu l'as bien résumé : "Si on ne vit pas de son travail, on ne vit pas dignement... hein ?". Sommes- nous si dupes que nous t'ayons élu ?
*Il ne faut pas exploiter les faits divers, mais la lettre à ses parents d'un Magistrat n'est pas ordinaire
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