mardi 18 décembre 2012

Ma lettre à moi : "Le départ d'Dieu"

Je ne peux m'empêcher de faire mon Gérard à l'envers, là aussi en forme d'adresse au Premier Ministre... 



Je suis né en 1969, j'ai commencé à travailler comme artiste dramatique à seulement 23 ans. Je suis un auteur et un acteur. La première fois que j'ai payé un impôt, c'était un bon signe accueilli avec joie à déjà 34 ans. Les nombreux films historiques auxquels j'aurais dû participer, si le service public audio-visuel n'avait pas été démantelé, m'auraient révélé au public dans mon talent. Je vous ferai donc grâce des citations que je n'ai pas eu l'honneur de déclamer.

J'ai tout à faire ici, mais je ne cesserai de rester vigilant même si la raréfaction de l'emploi me pousse déjà à me centrer sur ma survie personnelle.

Je reste ! alors que la France m'a abandonné juste après ma formation publique : elle avait su s'organiser pour que j'aille manger au restaurant social, mais surtout pas pour que je trouve un emploi.
Je reste ! alors que je pourrais aller faire fortune ailleurs, que je ne paye que 4% d'impôt, et que je n'ai pas dépassé les 1800 €/mois, en encore les bons mois... Vous me direz qu'avec si peu de moyens en poche, difficile de quitter le pays...

Moi, si je gagnais plus de 30 000 €/mois, j'aimerais être taxé à 100%. Et puis je vous fais un aveu, qui me vaudra des ennuis peut-être. Je n'ai jamais payé l'Impôt Foncier : je ne possède rien. Je suis donc prêt à subir un contrôle et un redressement.

Mieux, je demande à ce que ma contribution fiscale soit plus forte ! Mais qu'elle ait du sens, enfin quoi... ça me bouleverse, comme dirait un grand acteur pour qui cette lande était Trop belle pour lui. 

Que mon Impôt sur le Revenu soit mieux à même de subvenir aux besoins éducatifs, de santé, d'infrastructures dont les particuliers et les entreprises ont besoin, dont la culture a besoin, dans ce pays que j'aime de moins en moins, moi aussi, vu le nombre d'égoïstes qui y pullulent. 

Mais je refuse qu'on destine ma contribution au plein remboursement d'étrangleurs de la force publique, ces établissements bancaires privés qui contraignent mon pays que j'aime à leur emprunter pour mieux être remboursés. 

Qui êtes-vous M. le Premier Ministre de François Hollande pour faire semblant d'ignorer l'intérêt supérieur de la nation, et ne pas nous jeter de vraies bouées de sauvetage depuis votre paquebot France, devenu pédalo France ? On se noie dans votre Europe, là. 

Oui, je suis furieux contre les dirigeants de tous ces pays soit-disant unis qui ont pris des décisions à l'encontre de tous nos intérêts vitaux depuis quarante ans. 

Les richissimes menacent de s'installer derrière les frontières ! Il y a donc encore des frontières ? Comme c'est bizarre... Celles qui limitent la circulation des hommes pauvres, mais s'aveuglent sur la circulation des capitaux ! Les frontières qui arrangent les fiscalistes et les policiers... ah, je comprends.

Ils s'en vont ? Qu'ils partent... Nous sommes un pays libre et les riches sont plus libres que les autres... 
Qu'ils partent ! Car il n'y a pas de place dans mon pays pour les banksters et les asociaux fiscaux. Qu'ils rendent leur passeport tout de suite et se déclarent apatrides. 
Que partent les égoïstes : au faîte de leur gloire, ils se prennent toujours pour dieu, ils se croient indispensables car banquables. 

Dans cette affaire je demande le départ des dieux."Nous créons des emplois" se targuent-ils... mais ne font qu'utiliser et profiter d'une ressource humaine disponible, par trop disponible, hélas, ça presse sur le prix de leur travail : leurs salaires trop petits, ils paieront moins d'impôts, et seront à plaindre. 
Certains richissimes ont la contrainte sélective. 
Ils l'évoquent à tout crin, alors qu'ils prônent par ailleurs les doubles contraintes, l'actionariale et la concurrentielle qui n'ont pas l'air de les gêner beaucoup celles-là !... ... 
Contraints de s'enfuir parce qu'ils sont obèses quand d'autres sont contraints de rester parce qu'ils sont faméliques. Le piège de la pensée. Prends donc l'oseille et tire-toi, eh maraud ! 

Ne pourrait-on pas offrir une aide au départ à tous ces riches Français asociaux qui veulent s'expatrier ? Je suis sérieux, ils nous coûtent cher, ils prennent de la place, ils font monter le prix de nos logements, ils polluent... 

Mon public, je ne l'ai quasiment jamais rencontré. Tout comme les employeurs, très peu rencontrés. Tapis qu'ils sont dans leur féodalité, ils ne se penchent pas sur "les minables". Trop occupés. J'aurai reçu toute ma formation sur les deniers publics de mon pays qui a financé ma qualité d'acteur. Je le remercie pour cela. J'ai fini mes études complètes dans une école nationale supérieure d'Art Dramatique, ça se paye ça, car je n'ai jamais déboursé un centime pour ma formation. Et une formation, quelle qu'elle soit, ça n'a pas de prix, et en particulier les formations de l'esprit. 

Il faut donc que l'esprit de certains soient bien déformés par ceci : la Comparaison. 

Tant qu'on donnera la possibilité à des gens, à des peuples, de se comparer avec ce que paie son voisin, on instaurera une injustice de fait, qui génèrera frustrations et comportements asociaux, le départ de ceux qui en ont les moyens. La question centrale est ici.

Ceux qui ont du cholestérol, du diabète ne sont plus nécessairement ceux qui sont gras. Ce sont à présent ceux qui mangent mal ; ça se paye, ça... 

Cependant, tous ceux qui quittent la France ne peuvent pas être injuriés. On n'a pas lynché la famille Auchan ou Bernard Arnault sur le départ après tout. Les acteurs, c'est commode, lorsqu'ils sont pauvres, ils profitent du système, et quand ils sont riches, ce sont des salauds. 

Ils sont victimes comme je le suis d'un système mal foutu.

L'Europe est arrivée à un tel point dans la glorification de la concurrence commerciale qu'elle opère à des mutations. Les citoyens se muent en traîtres et se demandent combien ils paieraient ici ou là. Les investisseurs industriels se muent en apothicaires et se demandent combien on peut économiser sur la rétribution de ceux qui travaillent ici ou là. Les cinéastes cherchent les figurants les moins chers. Les éditeurs cherchent l'imprimeur le moins cher.

Le citoyen européen qu'on nous vend est réduit à chercher, chercher comment dépenser toujours moins d'argent. Pas dans un yacht, un hôtel particulier ou une voiture, non, non : ...moins dans les contributions légales destinées au bien-être collectif. 

Partout où les Etats sont privatisés, l'impôt perd sa raison d'être. Demandez à un Italien et à un Suédois, vous n'aurez pas la même réponse...

D'aucuns me considéreront comme un minable, alors que je n'ai jamais fait de mal à personne. En neuf ans d'imposabilité, j'ai donné 6000 euros. 

Je n'ai pas les moyens de m'exiler, moi, sinon je vivrais à Vanuatu. Tant qu'à faire, partir c'est mourir un peu, alors autant que ce soit au soleil.

Malgré mes façons austères, ma fréquentation des magasins discount, je conserve un amour de la vie et je reste poli.

samedi 1 décembre 2012

Ecosocialisme en France, l'An I

Le Parti de Gauche créé en 2008 appelait ce samedi 1er décembre aux premières Assises de l'Ecosocialisme. Se dégageait là un enthousiasme qui tranchait sévèrement avec la pusillanimité qui règne en ce moment dans certaines sphères politiciennes. Au même moment, ironie du calendrier, le gouvernement français cédait une fois de plus aux sirènes qui réduisent Ulysse à l'impuissance, et décidait donc de ne pas nationaliser les acieries de Florange.

L'écosocialisme, il ne s'agit ni d'un gadget ni de marketing politique. Comme l'a rappelé Henri Pena-Ruiz (Marx, quand même ed. Plonet d'autres intervenants de qualité, ce parti politique a été fondé sur cet axe qui unit Ecologie-Socialisme-République, avec les tirets, indissociablement.

C'est à une perspective de convergence, ou de dépassement des divergences, que s'attellent Jean-Luc Mélenchon, Martine Billard et Susan George, Arno Munster, Jacques Testart, Michaël Löwy, Paul Ariès (c'est tout sauf un homme seul, qu'on se le dise). En cela, il confirme une cohérence dans la construction politique. Nous n'avons pas affaire à des fanfarons.

Mieux, car on parle de "crises" et non de "crise", il s'agit en 2012 en pleine crise de l'Europe, accélérée par la crise financière des dettes privées américaines du nord, de trouver une issue par le haut et tracer un avenir. Il s'agit aussi de déclencher une synthèse par ce projet aux enjeux ô combien contemporains, de la faire avancer au sein des organisations politiques de la gauche du "Non" dans notre pays, et par contagion à d'autres. Cette journée aurait pu avoir comme sous-titre, "l'avenir se prépare".
C'est à un aggiornamento historique du socialisme que Jean-Luc Mélenchon convie la société, adossé à une analyse marxienne de la crise du capitalisme. Pour confrontés que nous sommes à des comportements problématiques de l'humanité, qui n'a pas le même impact sur son environnement à 7 milliards d'habitants qu'à deux milliards, que faisons-nous ? On regarde, impuissants ? Confrontés que nous sommes, tous, et c'est même la seule égalité politique, à un système capitaliste qui a  non seulement pour symptômes le surendettement généralisé des particuliers, des entreprises et maintenant des Etats, mais surtout la sur-production, la sur-consommation et la sur-pollution. Car on ne le dit jamais, la face sombre de la société de consommation c'est la société de défécation... 

Le capitalisme qui est dans l'impasse depuis 2008 n'a aucun intérêt pour survivre à ce que les 99% prennent conscience des dégâts dont il est le responsable dans l'ombre, même si -il faut le concéder aux courageux contempteurs de ce système défaillant qui sont légion dans l'intelligentsia- la mer d'Aral aussi a souffert, et souffre encore, des maux du productivisme, M. Mélenchon le rappelait lui-même.

Discutant, confrontant les points de vue tout au long de la journée, Jacques Généreux a parlé de "4ème Voie". Et pas d'une nouvelle troisième voie, qui ne ferait que trouver un compromis social-démocrate entre Marché et Etat, entre Efficacité et Justice, toutes synthèses bancales entre deux principes opposés, etc, mais d'un nouveau contrat républicain qui ne s'dresse pas à la gauche mais à l'humanité, adossé à la conscience de l'homme du XXI° siècle, conscient d'un monde aux ressources limitées, qui ajouterait à son triptyque Liberté, Egalité, Fraternité, la Viabilité.
Hervé Kempf lui, trouvait que le « Manifeste des Assises pour un écosocialisme » mis à l'amendement ce jour était encore prématuré, qu'il fallait encore faire aboutir ce nouveau paradigme politique, que les Equatoriens appellent, par la voix de son ministre Gallego, présent à Paris, appelait le Socialisme du "buen vivir" et son contrat écologique. Pour cela, rappelait-il, leur Président Rafael Correa a d'abord fait modifier la Constitution du pays pour s'affranchir des dépendances financières extérieures qui brideraient tout projet de ce genre, comme le feraient ici les Traités européens. Puis il montré par le menu comment les moyens de productions agricoles ont été modifiés, comme tout cela a procédé, quelles lois ont contraint même les banques privées à participer au financement d'un RSA local, etc.

Comment doit être appelé la doctrine à laquelle se réfère le Parti de Gauche ? Néo-communisme comme le décrie nos adversaires ? Socialisme de gauche ? Ecoscialisme?  Ce dernier concept d'Ecosocialisme avait une histoire.
En 1974, déjà la déclaration de Cocoyoc débattait de « l'utilisation des ressources, de l'environnement et des stratégies de développement ». Puis Joël de Rosnay employait dès 1975 le terme d'écosocialisme pour décrire « une convergence des grandes politiques économiques et sociétales vers la protection de l'environnement ».


Plus récemment, Michaël Löwy co-écrivait ainsi avec Joel Kovel en 2001 le premier «Manifeste écosocialiste international», qui servira de référence au «Réseau écosocialiste international» fondé à Paris en octobre 2007. Puis, lors du forum social mondial de Bélem en 2009, est rédigée la «Déclaration écosocialiste de Bélem». C'est donc bien dans la volonté de se rapprocher un peu plus encore des révolutions citoyennes qui ont eu lieu, ou qui sont en train de se réaliser, en Amérique du Sud l'ancrage du Parti de Gauche que président Martine Billard et Jean-Luc Mélenchon. 

L'ordre commercial du libre-échange, carcan juridique et arme de destruction massive de l'environnement, doit être aboli dans sa forme dictatoriale qui pratique un internationalisme de mauvais aloi depuis plus de quarante ans. Il ne s'agit pas de se refermer sur soi. On peut continuer l'ouverture entre les nations mais coopérative, mais sur la base d'une autonomie retrouvée, alimentaire, financière etc. Ce paradigme nouveau structurera les futurs programmes de gouvernement écosocialiste alternatif qui piloteront des Economies solidaires. Cela nécessitera bien sûr, non sans une transition laborieuse, une conversion écologique et sociale nationale de nos moyens de production, en trouvant les outils pour le faire ou les fabriquer. Loin du maketing qui vendrait un rêve, ce projet vend plutôt un défi.

Cette transition ne pourra se faire que sur un long terme, en orientant les capitaux de façon stratégique. Cela est présenté comme un vrai projet de politique concrète, qui n'a rien à voir avec un quelconque gauchisme car ce projet ne peut se réaliser qu'en changeant le cadre constitutionnel et juridique. C'est donc bien un projet ambitieux de gouvernement, tel qu'on peut en voir les prémisses en Amérique du Sud. L'avantage sur les autres utopies, c'est que celle-ci est en cours de réalisation, et offre son expérience à une Europe désormais en retard sur le monde.  

Voilà qui devrait donner des idées aux autres organisations de gauche, dans tous les pays où notre Europe s'englue.  

Celle qu'on appelait la gauche du non, la gauche indignée, la gauche de la gauche, se verrait bien en la gauche éclairante du XXI° siècle, qu'on appellera alors peut-être au XXII° siècle, "... des Lumières".